Le Tarot de l'art d'aimer - Arcane 13, l'arcane sans nom

2015


Support divinatoire pour certains, miroir psychologique pour d’autres, le Tarot s’adresse avant tout à notre monde intérieur, à cette partie secrète qui attend qu’on lève son voile pour nous donner à voir et à comprendre notre présence au monde. Vingt-deux arcanes majeurs qu’il faut considérer comme un livre initiatique auquel il manque la reliure. Cette reliure c’est à chacun de nous de la créer en fonction de notre parcours individuel et spirituel, car le tarot est avant tout un chemin initiatique qui s’ouvre par l’arcane I Le Bateleur jusqu’au Mat (l’arcane sans nombre). Et il ne saurait y avoir de chemin initiatique sans amour qu’il soit à la fois charnel et spirituel. Sur le plan de l’incarnation terrestre, l’amour a besoin de s’incarner dans une âme, un esprit et un corps. C’est pourquoi « Le tarot de l’art d’aimer » abordera essentiellement chaque lame sous cet éclairage, celui des sentiments et de l’amour. Nous découvrirons ainsi du premier au dernier arcane comment celui-ci vit sa passion amoureuse.

L'arcane sans nom


PRÉSENTATION :

Dans de nombreux Tarot, L’Arcane XIII est baptisé La Mort. Si l’idée de fin est sous-jacente dans cet arcane, le fixer ainsi en lui attribuant un nom balise son champ d’expression et limite l’analyse de son contenu. Pourquoi cette lame n’a-t-elle pas de nom ? N’oublions pas que nommer c’est assigner un code et de là toute une modalité d’action afférente à cette identité. Dans les doctrines liées à l’occultisme, connaître le nom, le prononcer avec précision permet d’exercer un pouvoir sur l’être ou sur l’objet. Dans certains rites initiatiques, lorsque l’impétrant a passé avec succès les étapes de l’initiation, on lui souffle à l’oreille un nom qui sera désormais sa nouvelle identité, marquant ainsi sa renaissance sur un nouveau plan de conscience et partant de là sa rupture radicale avec tout ce qui a constitué son identité antérieure. Le squelette néantise toutes notions de races, de sexes, d’identité puisqu’il représente l’essence physique de l’homme, sa partie non visible à l’œil nu. Par conséquent, L’Arcane sans nom ne symbolise pas la mort dans le sens radical du terme mais un changement de carnation.
Observons la lame : le squelette est actif, il n’est pas figé par une absence de vie, bien au contraire, il avance, il fauche mais en direction du passé, c’est-à-dire qu’il exige que nous mourions à ce qui nous a édifiés jusqu’à cet instant primordial. Il faut donc rompre, trancher nos racines pour faire peau neuve. Sa colonne vertébrale se compose de germes de blé ce qui démontre bien son aspect fertile. Le manche de la faux est jaune pour insister sur la valeur sacrée, solaire de l’acte et la lame rouge exprime à la fois le feu qui purifie et le sang, principe de vie.
Son pied droit n’est pas visible. Est-il enfoncé dans la terre ou est-il tranché ? Ce pied droit fait le pendant du pied gauche de l’arcane précédent Le Pendu en ce sens que se libérant totalement de l’emprise de ses racines, les forces de régénérations préparent sa future renaissance et donc son avenir. De plus, le fait que le pied soit enfoncé dans la terre noire, la matéria prima démontre bien l’opération alchimique de transformation et de sublimation.
Le message que nous délivre l’Arcane sans nom est le suivant : « N’ayez pas peur de la mort, mais mettez à mort vos peurs. »

SA FAÇON D'AIMER :

Cet arcane marque une fin, un divorce, une rupture brutale ressentie douloureusement. Le sujet a le sentiment de mourir tant sa souffrance est grande. L’idée du « plus rien ne me rattache ici bas » pourrait le conduire à commettre l’irréparable, par exemple. Mais cet arcane exprime une force de renaissance, de renouveau remarquable. Malgré la souffrance inhérente à cet arcane, la force de l’amour peut à elle seule aider le sujet à recouvrer la pulsion de vie. L’arcane sans nom est lié aussi aux pulsions. Si la personne sort d’une histoire sentimentale douloureuse, dans ce cas, L’Arcane sans nom, annonce la rencontre à venir d’un nouvel amour et de là la renaissance de cette personne par la magie de l’amour. Mais avant ça, il est nécessaire d’avoir opéré un travail intérieur suffisant afin d’éradiquer tout ce qui peut faire entrave à un futur lumineux.

PRÉCISION

Nous sommes arrivés à la moitié du chemin depuis L’arcane X - La roue de fortune qui symbolise la fin d’un cycle et l’amorce d’un nouveau. Donc, pour la relation entre L’arcane sans nom et Le Bateleur jusqu’au Pendu, lire les études précédentes.

INDICATION

lorsque j’indique à la droite ou la gauche de tel ou tel arcane, la lecture se fait à partir de l’arcane et non à partir du lecteur. Exemple : à la droite de L’Hermite c’est l’arcane vers lequel se dirigent le regard et la lanterne de L’Hermite. À sa gauche, il lui tourne le dos.
Toujours se mettre à la place des arcanes afin de bien épouser leur cheminement.

ET SI LORS D’UN TIRAGE, LA FORCE RENCONTRE :


LA TEMPÉRANCE : La Tempérance demande à L’Arcane sans nom de procéder à sa propre autocritique, de faire en priorité « un balayage en soi. » Pour cela, du temps est nécessaire afin de bien peser le pour et le contre. L’association de ces deux arcanes annonce une ouverture vers la sérénité, le calme intérieur. Sur le plan sentimental, c’est le retour à des sentiments plus stables, mieux acceptés. Mais ce peut être aussi la nécessité de faire le point, de marquer un temps d’arrêt afin de laisser place au discernement. Sinon, la rupture risque d’être brutale.

La Tempérance à la droite de L’Arcane sans nom : manque de lucidité, on tire sur la corde et le temps renforce les tensions.
À sa gauche : prise de conscience menant à un éclaircissement. Le pire peut être évité…


LE DIABLE : C’est la lutte des pulsions ! Le Diable et L’Arcane sans nom partagent des vues communes mais pas les mêmes objectifs. D’où des tensions intérieures terribles, un combat en soi de tous les instants. La séduction du Diable parviendra-t-elle à ses fins au point de faire perdre pied à L’Arcane sans nom ? Pas si sûr ! L’Arcane sans nom a pour lui la force nécessaire pour mettre un terme radical à ce qui le tourmente. Sentimentalement, c’est la passion infernale : amour/haine. Qui l’emportera ? Ne faut-il pas trancher une fois pour toutes pour se libérer totalement de l’emprise ?

Le Diable à la droite de L’Arcane sans nom : le désir domine et demande à être affronté ou vécu jusqu’au bout, et peu importe l’issu.
À sa gauche : les forces sont égales. Une harmonie est possible au prix d’un important lâcher-prise.


LA MAISON DIEU : Ça n’est pas l’annonce de la tranquillité, loin de là ! La Maison Dieu provoque, oblige à faire face à la réalité. Astrologiquement, c’est la rencontre d’Uranus (lame XVI) et de Pluton (Lame XIII). C’est donc à la fois la crise intérieure qui a des répercussions sur la vie en général. La couronne de la tour qui s’ouvre marque la puissance psychique qui demande à trouver une nouvelle orientation, à s’incarner autre par L’Arcane sans nom. Le sujet n’a pas d’autre alternative que de revoir de fond en comble ses valeurs et ses choix : professionnels, affectifs, amoureux, etc. Étape délicate qui réclame une grande prudence.

La Maison Dieu à la droite de L’Arcane sans nom : les événements le contraindront à devoir prendre des décisions radicales. Ce peut-être le coup de tonnerre, la nouvelle qui fait tout chanceler.
À sa gauche : le sujet agit au lieu de subir. Il se montre inflexible et peu enclin aux compromis. Il en va à ses yeux « du prix à payer. »


L’ÉTOILE : rencontre ô combien délicate ! Ce n’est pas de lucidité qu’il s’agit mais d’extra lucidité. Avec L’Etoile, L’Arcane sans nom parvient peu à peu à se délivrer de ses entraves, du fardeau qu’il traîne depuis trop longtemps. C’est en quelque sorte la fin des illusions. Mais lesquelles ? Sur le plan amoureux, ce peut être le moment où le sujet s’aperçoit que ses sentiments ne sont plus ce qu’ils étaient et qu’il convient d’apporter un réajustement. Autrement dit, remise en question sur soi ou rupture. Eh oui, L’Etoile, la porteuse d’espoir, doit en passer par un sacrifice imposé par L’Arcane sans nom.

A droite ou à gauche de L’Arcane sans nom, L’Etoile marque une libération vers un nouvel équilibre. Cette libération peut être vécue plus (à gauche) ou moins (à droite) douloureusement.


LA LUNE : La Lune, émotive et à fleur de peau, n’aime pas croiser la route L’Arcane sans nom. Ce dernier à contrario est attendri par elle. Cette association favorise l’intuition. La possibilité d’accéder aux couches les plus profondes de la psyché annonce bien des découvertes et des changements importants. Pour un couple, cela peut marquer une naissance dans l’acception large du terme (en cas de grossesse, celle-ci sera à surveiller). Sur un autre plan, toute la part affective du sujet est considérablement concernée : liens familiaux, relations avec les enfants, etc. Des risques de coupures pour ne pas dire de blessures affectives sont probables. La psychanalyse associe ces deux lames au complexe d’Œdipe.

La Lune à droite de L’Arcane sans nom : Le sujet fait face à ses choix et aux souffrances qui en découlent.
À sa gauche : Valse hésitation, les sentiments l’emportent, le sujet ne se décide pas.


LE SOLEIL : La puissance ignée (Le Soleil) et la force structurelle (L’Arcane sans nom). Deux énergies œuvrant chacune dans des directions opposées mais tendues vers le même objectif : la quête de la vérité. Le manche de la faux de la lame XIII est jaune donc porteur de valeurs solaires et c’est sur celles-ci que L’Arcane sans nom prend appui pour avancer. La rencontre de ces deux arcanes parle d’un processus d’élucidation, d’éclaircissement grâce à une prise de conscience aiguë et intransigeante. En psychanalyse on associe ces deux lames au complexe d’Electre. Sur le plan sentimental, cela marque une remontée vers la lumière, la possibilité d’incarner la beauté et le langage du cœur.

Le Soleil à droite de L’Arcane sans nom : le sujet n’est pas encore conscient des réels enjeux, il est encore le jouet de tourments qui l’empêche de trouver la solution qui est pourtant à sa portée.
À sa gauche : « Eurêka, j’ai trouvé ! » Tout s’éclaire, c’est la libération.


LE JUGEMENT : Cette lame demande à L’Arcane sans nom de se rattacher au « principe supérieur » en l’absence duquel nulle libération n’est possible. Autrement dit, Le Jugement place la barre haut, très haut. L’Arcane sans nom doit donc procéder à une autocritique absolue et impitoyable. Pour un couple, cela peut marquer une étape cruciale qui réclame une probité et un courage à toute épreuve. Chacun doit reconnaître ses torts ou alors la brèche ne cessera de s’élargir… Phase délicate mais nécessaire pour repartir sur des bases nouvelles. L’association de ces deux lames parle aussi de l’heure dernière, symbolique ou non. Se mettre à sa propre écoute s’impose.

Le Jugement à droite de L’Arcane sans nom : on reste ferme sur ses positions. Sûr de soi. Il y a là un déni de la réalité avec toutes les conséquences qui s’ensuivront.
À sa gauche : on accepte sans se résigner, on affronte et s’affronte. L’aboutissement sera salvateur.


LE MONDE : Que ce soit sur le plan spirituel ou le plan matériel, la rencontre de ces lames est prometteuse d’une très belle évolution. Le personnage central de la lame XXI est de couleur chair tout comme celui de la lame XIII. Ce même personnage de la lame XXI adopte la même position que Le Pendu (lame XII) mais à l’endroit et libéré de ses liens. Tout ceci indique un renversement de situation, un équilibre qui s’installe à la suite d’épreuves qui ont transfiguré le sujet. Il en ressort transformé, d’aucuns diraient métamorphosé, ce qui est en adéquation avec la symbolique de L’Arcane sans nom, rattaché à Pluton.

Le Monde à droite de L’Arcane sans nom : tout est compris, intégré, le sujet poursuit sa route car il s’est réconcilié avec lui et avec la vie.
À sa gauche : de découverte en découverte, il avance vers sa réalisation. Mais gare à ne pas sauter d’étape.


LE MAT : L’arcane sans nombre (Le Mat) rencontre L’Arcane sans nom (Lame XIII). Crise d’identité. Besoin de s’arracher des contingences. C’est à la fois le dépouillement intérieur et extérieur. Le sujet pressent que « ça ne peut plus continuer ainsi ». Mais de quoi est constitué ce « ça » ? Grand moment de solitude. L’impératif est d’avancer coûte que coûte car l’immobilité est synonyme de fin, voire de mort. D’où un balayage nécessaire des valeurs, des sentiments, des certitudes, tout chancelle et donne le vertige. Peu importe le sens de la rencontre, ces deux arcanes se poursuivent. L’un pousse l’autre dans ses retranchements.

Le Mat à droite de L’Arcane sans nom : des rencontres inattendues peuvent aider à la prise de décisions. Le sujet se sent protégé, aidé par une force invisible.
À sa gauche : on perçoit clairement les choses et on n’hésite pas à trancher à la base s’il le faut. On ne compte sur personne car l’on sait intuitivement que la réponse est en soi.

PROCHAIN RENDEZ-VOUS : L’arcane XIV - LA TEMPERANCE

Fabrice Pascaud pour AVS
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